La mobilité, c’est le travail et son organisation. Nous avons pensé qu’un élément positif de la crise sanitaire pourrait être qu’on avait appris à travailler à distance. Et là, deux voies étaient possibles : apprendre à travailler en limitant ses déplacements et/ou les planifiant différemment, ce qui demande des efforts, ou refaire comme avant, ce qui est plus facile. L’indicateur global « pifomètre-embouteillage » indique que nous sommes surtout revenus au système d’avant. Les déplacements sont également une ponction sur le temps personnel pouvant aller jusqu’à plusieurs heures par jour, avec toutes les implications négatives sur la qualité de vie.
Car la mobilité, c’est aussi la vie domestique. Maurice à moins de véhicules en circulation que La Réunion malgré une population bien supérieure. C’est dire que le potentiel de développement est important. Le véhicule individuel reste un instrument de liberté et une aspiration pour tous. On ne va pas régler le problème avec plus d’autoponts et de voies rapides. Nous sommes dans une impasse.
La mobilité, c’est la santé. Le contraire est vrai. La sédentarité, c’est la maladie. Or paradoxalement, plus de déplacements s’est traduit par plus de sédentarité. Réapprenons à pédaler, marcher, et gagnons des années de vie en bonne santé. Cela se fait très bien ailleurs. Pourquoi pas ici ?
La mobilité, c’est de l’énergie. Maurice a déjà formulé des ambitions claires et importantes dans ce domaine. Elle les a déclinées dans la production électrique avec l’objectif de sortir du charbon en 2030. Maurice accueille le développement le plus prometteur en production d’énergie renouvelable, la production par Kite. D’autres initiatives sont possibles et contribueraient à cette image positive, comme par exemple, la transformation en énergie par pyrolyse à Haute température[1] des 75000 t[2] de plastiques qui finissent à Mare-Chicose chaque année (site de stockage des déchets dans le sud).
Un modèle de transition vers une mobilité durable ?
En revanche, tout reste à faire dans la mobilité qui représente pourtant 54% de l’énergie finale consommée dans le pays[3]. Par sa géographie avantageuse, Maurice a pourtant les moyens de renverser la table et devenir un modèle de transition vers une mobilité durable : collective, sobre, avec de l’énergie renouvelable.
Collective car des transports en commun de qualité doivent être compétitifs. Nous avons déjà le métro léger. D’autres solutions comme des tramways sur roues pourraient compléter ce dispositif à moindres coûts.
Sobre car la surconsommation de déplacements inutiles, coûteux et chronophages doit être évitée, sobre également car des véhicules légers doivent être privilégiés.
Et avec de l’énergie solaire si les véhicules sont électriques. Comme l’a dit le Pr. Gunter Pauli lors du workshop organisé par le Charles Telfair Centre : « la transition énergétique et la mobilité doivent être planifiées ensemble ».
Avancer dans toutes ces directions ferait de Maurice un exemple sur les plan social et environnemental. Les Mauriciens en seront les premiers bénéficiaires. Et Maurice, désormais sur la carte mondiale du développement durable, aura alors un avantage concurrentiel pour le tourisme et le global business.
Alors, on continue comme avant ou on prend quelques longueurs d’avance ?
*Né en France en 1962 et Mauricien d’adoption, Jean-Luc Wilain se met au service d’une cause : faire dès aujourd’hui ce qui est nécessaire pour transmettre un monde vivable aux générations futures. Ingénieur des Mines, titulaire d’un Advanced Management Program en gestion et stratégie, il a exercé la plupart des métiers de l’entreprise dans cinq pays et a été en affaires avec une cinquantaine. Dernièrement responsable du développement durable d’un conglomérat mauricien, il a décidé de quitter ce confort pour se consacrer, avec sa société de conseil WillChange, au conseil en entreprise, au développement de solutions innovantes et durables, et au partage à travers des publications, des conférences et des formations.
[1] Précision importante.
[2] Pouvoir calorifique de 2 RED EAGLE.
[3] Statistics Mauritius. Chiffres 2019. Dernière année de référence. L’énergie finale est celle que nous mettons dans nos machines (électricité, carburants, etc … )