Photo : Arrivée de pêche à Dubaï (archives – Thomas Vignault).

Dans sa dernière lettre mensuelle, Didier Dérand, président de l’association VAGUES et représentant du Collectif “Requins en Danger à la Réunion” nous tient informés des derniers chiffres sur la politique de «pêche aveugle », pour reprendre ses termes, des requins à La Réunion.

D’après la synthèse de pêche de juillet publiée par le Centre Sécurité Requin (CSR), on notera en particulier :

  • Encore 5 requins tigres, tous juvéniles, tués inutilement (les requins tigres ont été responsables d’un seul accident depuis février 2011, soit en 13 ans et demi).
  • Une raie guitare à taches blanches et un requin marteau halicorne capturés et « relâchés vivants » (en danger critique d’extinction).
  • On en est à 743 requins ciblés tués au 31 juillet 2024 (185 bouledogues et 558 tigres).
  • Un total de 194 590 heures de pêche cumulées depuis le 29 mars 2018 (146 700 + 47 890), dont près de 82 000 (42 % aux dires du préfet) dans la Réserve marine.

Le CSR se targue du fait que « La grande raie guitare capturée sur Saint-Leu avait déjà une marque acoustique. C’est la 3ème fois que cet animal est capturé sur Saint-Leu depuis fin mars 2024 ». Nous n’y voyons pas forcément un motif de réjouissance. La mortalité cumulative résultant de multiples événements de capture et relâcher [C&R : “catch and release”] a été mise en évidence il y a 20 ans déjà par Bartholomew & Bohnsack :

« Ce risque est un facteur particulièrement important pour les espèces à longue durée de vie et les populations soumises à une pression de pêche intense (Musick, 1999). Notre modèle de mortalité cumulative (figure 10) montre que la mortalité totale augmente rapidement en réponse à des lâchers répétés en fonction de la probabilité de mortalité par événement. Par exemple, un mérou rouge ayant une probabilité de mortalité de 12 % par relâchement a une probabilité cumulée de 72 % de mourir après 10 événements. Lorsque les taux de rencontre avec la pêche à la ligne sont élevés, la mortalité des poissons relâchés pourrait approcher la certitude, en particulier pour les espèces dont la durée de vie s’étend sur des décennies (Plan Development Team, 1990 ; Coleman et al., 1999). La preuve que les événements de C&R multiples sont courants dans certaines pêcheries provient d’études de marquage qui rapportent des taux de recapture élevés et des intervalles de recapture courts. [….] » (page 42)

Il apparaît que ce dispositif, efficace quoique très coûteux dans son fonctionnement, souffrirait de graves problèmes de sécurité, conséquence de la politique de ses responsables visant à « maximiser le nombre de déploiements afin de maintenir leur niveau de subventions, la sécurité des salariés passant au second plan ».

Nous attendons toujours – quoique sans grand espoir – une réponse du préfet de la Réunion.

Il est à noter que :

  • Près de 90 % des espèces dont nous avons demandé la protection devant le Conseil d’État sont des espèces ayant le statut « En danger critique », « En danger », « Vulnérable » ou « Quasi menacée », dont l’UICN recommande également la couverture par des arrêtés de protection.
  • La totalité des espèces présentes à la Réunion et dont nous avons demandé la protection devant le Conseil d’État ont l’un ou l’autre de ces statuts.

 

Plus d’infos :

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Bartholomew A., Bohnsack J.A. (2004) – A Review of Catch-and-Release Angling Mortality with Implications for No-take Reserves. Rev Fish Biol Fisheries 15, 129–154.