Le docteur Karishma Ansaram*, qui collabore avec le Journal des Archipels régulièrement, était présente à la COP 28 qui s’est déroulée en décembre 2023 à Dubaï aux Émirats arabes unis.
Elle regrette ici que l’accord final de la dernière COP ait été approuvé alors que les représentants des petits États insulaires en développement (PEID) n’étaient pas dans la salle.
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« La COP28 a vu plusieurs annonces de haut niveau, telles que la “Déclaration conjointe concernant l’amélioration du crédit des financements souverains liés à la durabilité pour la nature et le climat”, annoncée par les banques multilatérales de développement et d’autres organisations internationales. La déclaration reconnaît la vulnérabilité croissante des PEID et insiste pour que les pays riches accélèrent l’annulation de leur dette et fournissent un financement adéquat pour le climat, basé sur des subventions. Un appel à la «collaboration des acteurs du financement privé sur l’adaptation et la résilience» a également été lancé. L’amélioration de l’accessibilité et de la disponibilité des informations physiques sur les risques climatiques et la résilience peut apporter des avantages considérables à plus grande échelle.
Les gouvernements des PEID devraient créer un environnement favorable.
Les réformes des instruments de financement et des mécanismes de la dette sont impératives pour que les PEID s’adaptent au changement climatique et favorisent le développement durable. Des initiatives telles que l’initiative de Bridgetown vont dans le bon sens, en préconisant des changements dans les structures de financement et les mécanismes de la dette. L’exploration de véhicules de financement spécifiques aux PEID dans les banques multilatérales de développement (BMD), les institutions financières internationales (IFI) et le Fonds vert pour le climat (FVC) peut améliorer l’accès de ces nations vulnérables. L’indice de vulnérabilité multidimensionnelle (IVM) est un autre outil qui mérite d’être pris en considération. Cet indice peut aider les PEID et d’autres pays vulnérables à accéder à des financements concessionnels et à réduire leur dette.
En outre, les gouvernements des PEID devraient envisager de créer un environnement favorable, par exemple en soutenant la recherche et le développement, les subventions, les incitations fiscales ciblées sur la résilience et les mesures d’adaptation qui comportent un élément de réduction des risques ou des politiques de passation de marchés, entre autres. Le partage des connaissances et de l’expertise entre le secteur public et le secteur privé est un élément essentiel pour parvenir à une compréhension mutuelle de la mobilisation du financement climatique.
«Les PEID de l’océan Indien devraient avoir message commun».
Les PEID sont confrontés à des défis uniques qui nécessitent un plaidoyer politique unifié. L’Alliance des petits États insulaires, en particulier, a joué un rôle central dans le lobbying en faveur du Fonds pour les pertes et dommages, point culminant de plus de 30 ans de persévérance dans les négociations sur le climat. L’AOSIS qui représente les petits États insulaires les plus sensibles au changement climatique, a exposé ses priorités lors de la COP28, mettant en lumière le besoin urgent de financement pour le climat. Les États insulaires des Caraïbes ont forgé un front uni avant la COP28, soulignant la nécessité d’une action collective, mais les petits États insulaires d’autres régions, incluant l’océan Indien, ne suivent pas le même rythme.
Les PEID de l’océan Indien peuvent utiliser des plateformes telles que l’Indian Ocean Rim Association (IORA, Association des États riverains de l’océan Indien) pour s’attaquer collectivement au changement climatique. Ils devraient également transmettre le même message commun. Par exemple, malgré la présence croissante des parties prenantes mauriciennes à la COP28, nous avons remarqué que l’accent est toujours mis sur la transition énergétique ou l’atténuation plutôt que sur l’adaptation et la résilience, dont le pays et la région ont le plus grand besoin. Nous pouvons noter un mouvement significatif dans les Caraïbes avec la Barbade jouant un rôle clé dans le Sommet de Paris en 2023 et Antigua et Barbuda se préparant à la quatrième Conférence internationale sur les PEID en mai 2024. Le monde doit entendre, inclure et agir pour les PEID.»
*Mauricienne, Karishma Ansaram, est analyste sur les réformes de la dette et le changement climatique. Elle enseigne et supervise des recherches sur la finance durable à l’Université d’Oxford (Royaume-Uni), à la Rotterdam School of Management, (Pays-Bas), et à l’IESEG School of Management (France). Elle est titulaire d’un doctorat sur la finance climatique et la tarification du carbone de l’Université de Lille (France) et suit les négociations sur la finance climatique à la CCNUCC (Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques), notamment lors de COP.