« Atteindre des Objectifs de Développement Durable requiert non seulement du financement pour des projets environnementaux mais aussi pour des projets à portée sociale », déclare Thierry Hebraud, Head of Corporate and Institutional Banking de la MCB.
La première banque du pays et de l’océan Indien a depuis quelques années mis au cœur de sa stratégie le développement durable. Mentionnons le rapport Klima Neutral 2050 publié en 2020 qui propose une feuille de route nationale pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, Lokal is beautiful qui promeut l’économie locale et Success Beyond Numbers qui vise à mesurer l’impact de la banque en termes des fameux ESG (Economie, Social, Gouvernance). Thierry Hebraud, Head of Corporate and Institutional Banking de la MCB, nous en parle.
Propos recueillis par Alexandre Karghoo
Le Journal des Archipels : Quand on parle de finance verte, de quoi parle-t-on au niveau de la MCB ?
Thierry Hebraud : Premièrement, il est essentiel de définir ce que l’on veut dire lorsque l’on évoque la finance verte car il y a souvent une confusion entre différentes appellations : finance verte, finance climatique, finance durable, etc. A la MCB nous préférons utiliser le terme finance durable qui est beaucoup plus générique et qui comprend à la fois la finance climatique, la finance verte et la finance sociale. En effet atteindre des Objectifs de Développement Durable requiert non seulement du financement pour des projets environnementaux mais aussi pour des projets à portée sociale.
Dans cette optique, qui dit finance durable, dit investissements à plus longs termes que les financements traditionnels. C’est bien là tout le challenge de ce sujet, car il requiert une approche différente au niveau du risque, et une compréhension plus profonde des technicités des projets « durables », donc réinventer des métiers bancaires traditionnels. Ce processus est aujourd’hui une priorité pour la MCB car nous voulons être le partenaire qui œuvre et accompagne ses clients dans leur transition écologique et énergétique.
JDA : Quelles sont les initiatives financières mises en place par la banque pour promouvoir : la transition écologique, le développement durable tel que défini par vous-même et l’atténuation des effets du changement climatique.
TH : Le programme SUNREF* a joué un rôle crucial dans notre compréhension et notre maîtrise du sujet. Aujourd’hui, à travers notre programme de développement durable Success Beyond Numbers, nous voulons mettre la notion du Triple Botton Line (TBL) ou Triple Bilan au cœur de notre métier de financiers : qu’il s’agisse de la stratégie, des opérations, des procédures, des produits et le soutien aux clients.
Des prêts à des taux préférentiels sur la base de performances en ESG
Suite au rapport Lokal is Beautiful, publié en 2019, nous avons mis en place un plan spécial, le Lokal is Beautiful Scheme afin d’accompagner les entrepreneurs mauriciens responsables dans leurs besoins. Ce programme de financement offre la possibilité aux PMEs d’obtenir des prêts à des taux préférentiels sur la base de leurs performances en matière d’environnement, de social et de gouvernance (ESG). Nous continuons, bien évidemment, notre partenariat avec l’AFD et SUNREF avec la certitude que les activités « vertes » vont reprendre en même temps que la sortie de la crise de la COVID-19.
Je dois souligner que nous travaillons, en ce moment, sur un projet qui a pour but de revoir et d’améliorer toutes nos capacités internes en termes de finance durable afin de mieux nous adapter au contexte local, voire d’accélérer la transition. Nous avons mis en place, en interne, une ligne de crédit verte que nous déploierons en choisissant des projets respectueux et vertueux.
Pour ce qui est du Groupe MCB (qui inclut la banque, mais aussi nos filiales), la MCB Leasing a lancé en décembre 2020 le Green Lease visant à financer, à un taux compétitif, l’achat de véhicules et d’équipements éco responsables.
JDA : Le programme Sunref a pour partenaire la MCB. Quel est le bilan actuel de ce programme ?
TH : Cette ligne de crédit a pour but de financer non seulement des projets « verts » liés à l’atténuation du changement climatique tels que ceux liés aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique. Nous retrouvons aussi des projets dits d’adaptation au changement climatique, qui consistent à augmenter la résilience des entreprises et des particuliers face à la transformation des conditions climatiques. Sous cette catégorie, nous retrouvons des projets tels que le dessalement de l’eau de mer, la récupération de l’eau de pluie, l’isolation thermique des bâtiments, etc. SUNREF I et II ont été des succès incontestables, mais la COVID-19 a malheureusement joué les trouble-fêtes quant au déploiement de la troisième ligne. Nous sommes, cependant, heureux de constater une reprise des activités et des projets verts depuis peu. L’élément innovant de la ligne III concerne l’égalité des genres, ayant aussi pour but encourager les entreprises mauriciennes à investir dans des programmes facilitant la parité homme-femme. Ces trois lignes combinées ont définitivement eu un impact positif sur notre environnement. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus de 86,000 tonnes de CO2 évitées et de nombreux autres indicateurs positifs autour de l’électricité, du gasoil ou du fioul non-consommés.
*Le programme Sustainable Use of Natural Resources and Energy Finance (SUNREF) existe depuis plus de 10 ans et la MCB est un partenaire bancaire depuis le début de ce programme à Maurice. La première ligne de crédit « verte » de l’Agence Française de Développement (AFD) date de 2009 avec SUNREF I, suivi de SUNREF II en 2014 et finalement SUNREF III en 2018.