Président du Conseil départemental de La Réunion, Cyrille Melchior nourrit une vraie ambition de transition écologique et solidaire pour son île. Par ses compétences et son ancrage territorial, la collectivité a, de fait, un rôle essentiel à jouer dans les enjeux et finalités du développement durable. Orientations agricoles, action sociale, gestion des forêts et coopération régionale : tels sont, entre autres, les leviers pour y arriver.
Par Olivier Pioch
Photographie Pierre Marchal
« Moins de déchets, plus de recyclage, plus de mobilité douce, neutralité carbone. »
Quand on l’interroge sur ses ambitions en termes d’environnement, Cyrille Melchior ne peut s’empêcher d’adopter une logique comptable.
C’est qu’à soixante ans, ce diplômé en comptabilité et gestion a longtemps œuvré dans les finances publiques avant de s’engager en politique. Forcément, cela laisse des traces. C’est donc en bon père de famille qu’il gère sa collectivité, soucieux d’en préserver les intérêts sans s’interdire d’investir sur l’avenir.
Aux autres les grandes phrases, lui veut agir. Et pour cela, il mise autant sur les compétences obligatoires du Département que sur une politique volontariste.
« Le Département fait des efforts très concrets pour devenir une collectivité éco-responsable. Pour être exemplaire, nous devons d’abord être une vitrine. C’est l’objet du Plan de Transition Ecologique et Solidaire que nous avons lancé l’an dernier. »
Ce document stratégique fixe la feuille de route des actions à construire. Un engagement qui commence d’abord par l’application à la collectivité elle-même des pratiques vertueuses qu’elle souhaite soutenir sur le territoire.
« C’est tout le sens de notre plan global de maitrise de la consommation électrique, le Plan NegaWatt, qui permettra au Département d’être une collectivité à énergie positive et à impact carbone maîtrisé à l’horizon 2023. Très concrètement, cela nous permettra d’injecter sur le réseau électrique une énergie renouvelable (solaire et hydraulique) supérieure à notre propre consommation annuelle. »
Une bonne façon de gérer les finances publiques, qui se traduit aussi par le soutien au développement des filières locales MDE (Maîtrise de l’Energie) et EnR (Energie Renouvelable). Des partenariats sont d’ailleurs noués avec EDF et le SIDELEC sur des projets d’envergure, tel que celui visant à l’électrification de Mafate.
Au-delà, les compétences du Département lui permettent de jouer un rôle clé sur l’environnement. Espaces naturels sensibles, forêts départemento-domaniales, zones humides, orientations agricoles… La collectivité dispose de fait d’un gros trousseau de clés pour préserver la biodiversité et protéger les milieux naturels.
A travers son réseau hydraulique, elle veut ainsi mettre en œuvre une irrigation « de résilience » basée sur une gestion durable des ressources en eau respectueuse de la biodiversité aquatique.
Plantation d’un million d’arbres indigènes et endémiques
Elle a par ailleurs engagé l’an dernier un programme ambitieux de reboisement qui vise à la plantation d’un million d’arbres indigènes et endémiques d’ici 2027. L’opération vise à reconquérir les zones naturelles envahies par les pestes végétales, mais aussi à créer des puits de carbone et des îlots de fraîcheur dans les zones urbaines. Un autre impact attendu est celui du retour des oiseaux dans les villes. Un partenariat avec la SEOR a été signé pour l’évaluer.
La collectivité vient également de finaliser son Schéma Général de la Restauration Scolaire pour la décennie 2022-2030 ; un schéma qui structure son action dans ce domaine afin d’augmenter la part des produits locaux dans la restauration collective.
Reste que c’est sans doute dans les Hauts de l’île que le Département a sa meilleure carte à jouer, dans ces territoires de pleine nature et de grande culture qui sont au fondement de l’identité réunionnaise.
« C’est là que se trouvent les potentiels d’innovation pour une économie plus locale et plus verte, les ressources nécessaires à la production de matériaux de construction bio-sourcés, la matière première exceptionnelle que sont les espaces naturels et les forêts pour la production d’énergie décarbonée. Notre rôle en tant que pouvoir public est de favoriser la structuration de ces filières dans une logique d’économie circulaire qui est aussi un moteur d’insertion et d’emploi. »
La reconstruction de l’éco-gîte du Piton de La Fournaise en est un symbole. Porté par le Département, ce chantier 100 % réunionnais s’inscrit dans une démarche d’éco-gestion énergétique qui vise à développer le tourisme vert et l’agro-tourisme.
Sur ce dernier volet, le Département a pleine compétence. Au-delà du Programme de Développement Rural, dont il est l’autorité de gestion, il pilote également le projet AGRIPéi 2030 en lien avec l’ensemble de la profession agricole.
« C’est un projet de grande envergure destiné à bâtir le modèle agricole de demain, qui permettra à nos agriculteurs de relever les nombreux défis du territoire : transition agro-écologique, résilience au changement climatique, évolution du comportement des consommateurs, souveraineté alimentaire… »
Au rang des actions à mener, il s’agit en particulier de rechercher l’autonomie alimentaire à travers une production efficiente et rémunératrice. Un vrai sujet pour les agriculteurs péi !
Reste que les enjeux de développement durable dépassent les frontières. Sur ce sujet aussi, le Département veut être exemplaire. Dans une logique de solidarité internationale et de renforcement des échanges humains, il soutient ainsi des projets comoriens et malgaches de gestion intégrée des ressources en eau, de développement des énergies renouvelables et de préservation de l’environnement.